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Agri-Photovoltaic: Synergies et champs de tension d'une stratégie à double usage

Agri-Photovoltaic: Synergies et champs de tension d'une stratégie à double usage

Agriphotovoltaïque : synergies et points de tension dans une stratégie à double usage – Image créative : Xpert.Digital

Potentiels et conflits : le rôle de l'agri-PV dans la transition énergétique

Agri-photovoltaïque : comment la double utilisation des terres transforme l'avenir énergétique

L'essor de l'agrivoltaïsme (PV agricole) marque une évolution majeure dans l'utilisation des terres. La production simultanée d'électricité et de denrées alimentaires sur une même surface engendre des innovations technologiques, mais aussi des conflits d'intérêts au sein de la société. Selon les prévisions actuelles, les systèmes PV agricoles en Europe centrale pourraient couvrir jusqu'à 68 % de la demande énergétique si seulement 9 % des terres agricoles étaient aménagées pour cette technologie. Si la capacité installée mondiale a connu une croissance exponentielle, passant de 5 MWc en 2012 à plus de 14 GWc en 2021, les objectifs ambitieux de développement, tels que celui de l'Allemagne d'atteindre 215 GW de capacité photovoltaïque d'ici 2030, se heurtent à des obstacles liés à l'acceptation du public et à la réglementation. L'institut Fraunhofer ISE estime le potentiel de l'agrivoltaïsme en Allemagne à 1 700 GWc, mais des projets comme le parc solaire de 300 hectares prévu à Geiseltal, en Saxe-Anhalt, montrent que la transformation des paysages agricoles peut engendrer de profondes perturbations socio-économiques.

Innovations technologiques et interactions agroécologiques

Conception du système et optimisation du rendement

Les concepts modernes d'agri-PV reposent sur une triple optimisation : rendement énergétique, productivité agricole et résilience écologique. Les modules solaires bifaciaux, qui absorbent la lumière sur leurs deux faces, atteignent une transmittance lumineuse de 70 à 80 % grâce à une hauteur de montage accrue (3 à 5 m) et un espacement généreux entre les rangs (10 à 15 m), ce qui se traduit par une augmentation de la productivité des terres de 42 à 87 % dans le cadre du projet APV-RESOLA. Les installations verticales, comme le système Next2Sun, exploitent une orientation est-ouest pour produire un pic d'électricité le matin et le soir, tout en assurant un ensoleillement suffisant pour la croissance des plantes en milieu de journée. Cette production d'énergie contracyclique réduit la congestion du réseau et, grâce à des structures modulaires en acier, permet l'utilisation de machines agricoles.

Effets microclimatiques et rendements des plantes

L'ombrage partiel induit par les modules photovoltaïques crée un microclimat plus stable, ce qui peut entraîner une augmentation des rendements allant jusqu'à 16 % pour les cultures de petits fruits lors des années sèches. Des mesures à long terme effectuées à la station expérimentale du lac de Constance ont mis en évidence des rendements de blé supérieurs sous modules photovoltaïques (+7 %) durant la canicule de l'été 2018, tout en réduisant les besoins en irrigation de 20 %. À l'inverse, des pertes de rendement allant jusqu'à 33 % ont été observées lors d'années aux conditions climatiques équilibrées, soulignant ainsi la dépendance des rendements au niveau de stress climatique. À l'avenir, des systèmes adaptatifs dotés de modules de suivi solaire ou de revêtements sélectifs pourraient permettre une gestion de l'ombrage en fonction des besoins.

Potentiels de transformation économique et risques opérationnels

Diversification des revenus pour les exploitations agricoles

L'agri-PV offre aux agriculteurs une double source de revenus : la production d'électricité génère des loyers de 3 000 à 4 000 €/ha, tandis que 85 % des paiements directs de l'UE leur sont reversés. Une étude de cas polonaise montre que la combinaison des rendements blé et électricité augmente le bénéfice net par hectare de 1 268 € (PV + blé) par rapport aux pertes attendues pour la monoculture en 2024. L'université de Göttingen a constaté un taux d'acceptation de 72,4 % parmi les agriculteurs, la sécurité des revenus (68 %) et la viabilité future (52 %) ​​étant les principales motivations.

Défis liés aux infrastructures et au marché

Malgré la baisse des coûts de production à 4–6 ct/kWh, les goulets d'étranglement du réseau électrique freinent le raccordement des grandes centrales agro-photovoltaïques. Le projet de Geiseltal, d'une capacité prévue de 300 MW, nécessite la construction de 23 km de nouvelles lignes moyenne tension, soit 30 % de l'investissement total. Par ailleurs, les contrats de location standardisés font défaut : si des coopératives énergétiques, comme celle de Peißenberg, offrent aux agriculteurs la gratuité de l'utilisation des terres en échange d'électricité photovoltaïque, les modèles de partage des revenus, avec des loyers fixes et un partage des bénéfices, sont prédominants chez les promoteurs de projets commerciaux.

Les conflits d'acceptation sociopolitique et les obstacles liés au droit de l'aménagement du territoire

résistance locale et professionnalisation de la culture de la contestation

Le projet de parc solaire à Kienberg (Bavière) révèle des lignes de conflit typiques : une initiative citoyenne, ayant recueilli 1 836 voix (12,4 %), a obtenu trois sièges au conseil municipal et annoncé des poursuites judiciaires contre le projet. Des campagnes menées par des professionnels utilisent des récits visuels percutants (« bétonnage du paysage ») et collaborent avec des associations de protection de la nature qui s’opposent à la destruction de l’habitat du hamster d’Europe. Des experts en communication, comme Sándor Mohácsi, soulignent que la participation précoce du public et des visualisations transparentes (simulations en réalité virtuelle) favorisent l’acceptation du projet, mais que les opposants les plus radicaux sont difficilement mobilisables par des arguments rationnels.

Fragmentation du droit de l'urbanisme et aménagement du territoire

Malgré la modification de 2023 de la loi sur les énergies renouvelables (EEG), qui promeut l'agrivoltaïsme comme un « type particulier d'installation solaire », l'hétérogénéité des zonages fonciers freine la croissance du marché. Si la Bavière autorise l'agrivoltaïsme sur l'ensemble du territoire rural, des Länder comme le Bade-Wurtemberg exigent des évaluations complexes au cas par cas, conformément à l'article 35 du Code allemand de la construction (BauGB). L'étude de l'institut Fraunhofer critique le fait que 70 % des terres agricoles allemandes soient inaccessibles au développement du photovoltaïque en raison de leur statut de protection (FFH, protection des eaux), alors que, dans le même temps, 8 % des terres arables de l'UE, dans les pays du groupe de Visegrád, pourraient accueillir un potentiel photovoltaïque de 180 GW.

Exigences réglementaires en matière d'innovation et perspectives de développement

Harmonisation des cadres de financement et des normes technologiques

Les tarifs de rachat actuels, prévus par la loi allemande sur les énergies renouvelables (EEG), ne font pas de distinction entre les différents types de systèmes photovoltaïques agricoles, alors même que les installations verticales (Next2Sun) affichent des rendements inférieurs de 30 % tout en étant deux fois plus efficaces en termes d'utilisation des terres. Un système de bonus à trois niveaux – 0,5 ct/kWh pour les installations de base, +0,3 ct pour les mesures favorisant la biodiversité et +0,2 ct pour les cultures spécialisées – pourrait encourager l'innovation ciblée. Parallèlement, une norme DIN (actuellement en préparation : DIN SPEC 91434) est nécessaire pour définir la disponibilité lumineuse minimale (600–800 µmol/m²/s) et la hauteur de dégagement des machines (supérieure à 3,5 m).

Intégration dans les écosystèmes agricoles intelligents

Des projets futurs comme « Agri-PV 4.0 » associent des modules photovoltaïques à des capteurs IoT pour la surveillance du microclimat (humidité, durée d'humidité foliaire) et le contrôle automatisé de l'irrigation. Des installations pilotes en Rhénanie-Palatinat testent des modules organiques semi-transparents à transmission lumineuse adaptative, qui utilisent l'IA pour analyser les prévisions météorologiques et les données de croissance des plantes. Ces systèmes pourraient potentiellement intégrer la production d'hydrogène (électrolyseurs sous les modules) et l'agriphotocatalyse (purification de l'air grâce à des modules revêtus de TiO₂).

L'agri-PV comme catalyseur d'une transition intégrée de l'utilisation des terres

L'intégration de la technologie photovoltaïque dans les terres agricoles n'est pas un excès technocratique, mais une symbiose nécessaire pour faire face aux crises climatique et alimentaire. Comme le démontre le projet ReWA, le taux d'acceptation atteint 78 % lorsque les modèles régionaux d'électricité (25 % de consommation sur site) sont associés à la participation citoyenne (parts de 5 à 10 kWh à partir de 500 €). Un aménagement du territoire clair (zones prioritaires sur sols peu productifs) et des modalités de planification collaborative (tables rondes avec les agriculteurs, les écologistes et les municipalités) seront essentiels pour institutionnaliser la coexistence productive des cultures et de l'électricité. La réforme agricole européenne de 2027 offre l'opportunité d'utiliser spécifiquement des éco-régimes pour les systèmes agro-photovoltaïques favorisant la biodiversité, et ainsi récolter le double dividende de la protection du climat et de la biodiversité.

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