Icône du site Web Xpert.Digital

L'UE plonge l'industrie sidérurgique britannique dans la plus grande crise de son histoire

L'UE plonge l'industrie sidérurgique britannique dans la plus grande crise de son histoire

L'UE plonge l'industrie sidérurgique britannique dans la plus grave crise de son histoire – Image : Xpert.Digital

Choc de Bruxelles : l’acier britannique au bord de l’effondrement ?

Quel est le contexte de la crise actuelle dans l’industrie sidérurgique britannique ?

L'industrie sidérurgique britannique sera confrontée à ce qui sera probablement le plus grand défi de son histoire à l'automne 2025. Le 7 octobre 2025, la Commission européenne a annoncé des mesures de sauvegarde de grande envergure pour le secteur sidérurgique européen, qui auront un impact considérable sur l'industrie sidérurgique du Royaume-Uni. La Commission européenne propose de réduire les quotas d'importation d'acier en franchise de droits de 47 % par rapport aux volumes prévus pour 2024, à 18,3 millions de tonnes par an. Dans le même temps, le taux de droit de douane pour les volumes d'acier dépassant ce quota sera doublé, passant de 25 % à 50 %. Ces mesures visent à protéger l'industrie sidérurgique européenne des effets injustes des surcapacités mondiales, notamment de l'acier bon marché en provenance de Chine, qui pourrait être de plus en plus détourné vers l'Europe suite à l'imposition de droits de douane américains élevés.

Le cœur du problème : les nouvelles règles de l’UE et la dépendance de la Grande-Bretagne aux exportations

Ces mesures prévues représentent une menace existentielle pour l'industrie sidérurgique britannique. Environ 78 à 80 % des exportations britanniques d'acier sont destinées à l'Union européenne, soit une valeur d'environ trois milliards de livres sterling. Sur les quelque quatre millions de tonnes d'acier produites chaque année en Grande-Bretagne, environ 1,9 million de tonnes sont exportées vers l'UE. L'UE est donc de loin le principal marché d'exportation pour l'acier britannique. La dépendance de l'industrie sidérurgique britannique à l'égard de ce marché d'exportation la rend particulièrement vulnérable aux mesures de protection commerciale de l'UE.

Les représentants de l'industrie mettent en garde contre une catastrophe imminente

Les réactions de l'industrie sidérurgique britannique sont unanimement alarmantes. Gareth Stace, directeur général de l'association professionnelle UK Steel, a décrit la situation comme potentiellement la plus grave crise que l'industrie sidérurgique britannique ait jamais connue. Il a appelé le gouvernement britannique à exploiter pleinement ses relations commerciales avec l'Union européenne pour obtenir des quotas spécifiques pour le Royaume-Uni, faute de quoi la catastrophe est imminente. Stace a également mis en garde contre un deuxième risque grave : les mesures de l'UE pourraient empêcher l'exportation de millions de tonnes d'acier vers l'Europe, les droits de douane européens étant alors détournés vers le marché britannique. Cela pourrait sonner le glas de nombreuses entreprises sidérurgiques britanniques restantes.

Le syndicat communautaire, qui représente de nombreux sidérurgistes britanniques, décrit les mesures prévues par l'UE comme une menace existentielle pour l'industrie sidérurgique. Alasdair McDiarmid, secrétaire général adjoint du syndicat, a souligné que l'Europe est de loin la principale destination des exportations d'acier britanniques et que la perte de l'accès à ce marché aurait des conséquences catastrophiques sur l'emploi britannique. Il a appelé les gouvernements du Royaume-Uni et de l'UE à engager d'urgence des négociations afin d'atténuer les graves conséquences de ces propositions sur l'industrie sidérurgique. McDiarmid a averti qu'une guerre commerciale avec l'UE, alors que l'industrie sidérurgique mondiale subit déjà une pression énorme, serait dévastatrice pour toutes les parties concernées, les travailleurs du Royaume-Uni et d'Europe en faisant les frais.

Un secteur en chute libre : des chiffres de production à des niveaux historiquement bas

L'industrie sidérurgique britannique traverse une difficile transformation depuis des années. En 2024, la production d'acier brut au Royaume-Uni a chuté de 29 %, pour atteindre seulement quatre millions de tonnes. Il s'agit de la troisième baisse consécutive et d'un creux historique. À titre de comparaison, la production britannique d'acier brut a diminué des trois quarts depuis 2000. Le Royaume-Uni est passé de la 26e place parmi les producteurs mondiaux d'acier en 2023 à la 36e en 2024, se situant désormais entre la Suède et la Slovaquie. L'importance du pays dans la production mondiale d'acier a donc encore diminué.

La chute drastique de la production en 2024 est principalement due à la fermeture des hauts fourneaux de Port Talbot. L'aciérie de Port Talbot, la plus grande du Royaume-Uni, a fermé son premier haut fourneau en juillet 2024, suivi du deuxième et dernier en septembre 2024. Ces fermetures ont mis fin à plus de 100 ans de production d'acier primaire dans la ville. Les hauts fourneaux seront remplacés par un four à arc électrique, dont la mise en service est prévue d'ici fin 2027. Ce changement s'inscrit dans la transformation verte de l'industrie sidérurgique et devrait réduire les émissions de CO2 du site de 90 %. Le propriétaire indien, Tata Steel, investit 750 millions de livres sterling dans la construction du nouveau four à arc électrique, tandis que le gouvernement britannique y contribue à hauteur de 500 millions de livres sterling.

Le prix élevé de la modernisation : des milliers d’emplois perdus

La transition vers des méthodes de production plus respectueuses du climat a de graves conséquences sociales. Tata Steel a annoncé en janvier 2024 la suppression de 2 800 emplois, dont 2 500 en 18 mois. La plupart de ces suppressions d'emplois concerneront Port Talbot, et 300 autres pourraient survenir à Llanwern, Newport, d'ici trois ans. Avant la fermeture des hauts fourneaux, plus de 4 000 personnes travaillaient à l'aciérie de Port Talbot. Après la fermeture en octobre 2024, environ 2 000 employés sont restés sur place, principalement affectés à la transformation de plaques d'acier importées pour la production de produits en acier laminé.

Le syndicat communautaire a qualifié les projets de Tata Steel de dévastateurs pour Port Talbot et l'ensemble de la sidérurgie. Les pertes d'emplois auront non seulement un impact direct sur les ouvriers de l'aciérie, mais aussi sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et l'économie locale. Des études universitaires menées par l'Université de Leeds sur les licenciements massifs survenus dans la sidérurgie galloise au début des années 2000 ont montré que les ouvriers sidérurgistes concernés se heurtaient à d'importants obstacles structurels lors de leur transition vers un nouvel emploi et que ces licenciements avaient également des conséquences négatives dans des domaines tels que la santé et le logement. Le Dr Calvin Jones estime que les pertes d'emplois à Port Talbot pourraient entraîner une perte de revenus annuels d'environ 200 millions de livres sterling pour la ville, soit près de 15 % de son revenu brut total.

La tactique diplomatique de Londres dans la crise de l'acier

Le gouvernement britannique, dirigé par le Premier ministre Keir Starmer, a affiché un soutien fort à l'industrie sidérurgique, mais se trouve confronté à la difficile tâche de concilier des intérêts divergents. Lors de son vol pour l'Inde en octobre 2025, Starmer a annoncé que son gouvernement était en pourparlers avec l'UE au sujet des droits de douane proposés sur l'acier. Il a toutefois évité de fournir des détails ni de confirmer si le Royaume-Uni demanderait une exemption aux nouvelles règles. Starmer a simplement souligné que le gouvernement était en discussion avec l'UE et les États-Unis au sujet des droits de douane sur l'acier et qu'il donnerait davantage d'informations en temps voulu.

Le secrétaire au Commerce, Chris McDonald, a appelé la Commission européenne à clarifier d'urgence l'impact de cette mesure sur le Royaume-Uni. Il a souligné qu'il était crucial de protéger la circulation des marchandises entre le Royaume-Uni et l'UE et que le gouvernement collaborerait avec ses plus proches alliés pour relever les défis mondiaux plutôt que d'exacerber les inquiétudes des industries. Le gouvernement britannique a également annoncé qu'il continuerait d'explorer des mesures commerciales plus strictes pour protéger les producteurs d'acier britanniques contre les pratiques déloyales.

La logique derrière les mesures de protection de l'UE

L'Union européenne justifie ses mesures de sauvegarde par la nécessité de protéger l'industrie sidérurgique européenne des effets déloyaux de la surcapacité mondiale. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a souligné qu'un secteur sidérurgique fort et décarboné est crucial pour la compétitivité, la sécurité économique et l'autonomie stratégique de l'Union européenne. La surcapacité mondiale nuit à l'industrie et des mesures doivent être prises sans délai. Elle a appelé le Conseil et le Parlement à agir rapidement.

La Commission évoque une surcapacité mondiale dépassant largement les 600 millions de tonnes, soit plus de cinq fois la consommation annuelle d'acier de l'UE. Cette surcapacité, l'augmentation des importations d'acier et la fermeture des marchés des pays tiers affaiblissent la compétitivité du secteur, freinent les investissements dans la décarbonation et compromettent sa viabilité à long terme. L'UE accuse notamment la Chine d'utiliser les aides d'État pour avantager injustement son industrie sidérurgique et de favoriser une surabondance d'acier sur le marché mondial.

La surabondance d'acier en Chine inonde le marché mondial

La Chine est de loin le premier producteur mondial d'acier. Selon les chiffres de la World Steel Association, elle a produit plus d'un milliard de tonnes d'acier en 2024, soit plus de la moitié de la production mondiale. À titre de comparaison, l'industrie allemande a produit environ 37 millions de tonnes d'acier la même année. L'énorme surcapacité de la Chine résulte de la combinaison d'une faible demande intérieure, notamment due à la crise immobilière actuelle, et d'une production subventionnée par l'État. Cette surcapacité a conduit la Chine à accroître massivement ses exportations d'acier.

Les exportations chinoises d'acier ont bondi en 2024, dépassant de 50 % la moyenne quinquennale et de 19 % celles de la même période l'an dernier. Avec 95 millions de tonnes d'acier exportées en 2024, la Chine a atteint son plus haut niveau depuis 2015-2016. Grâce aux économies d'échelle, à la baisse des coûts des intrants et aux surcapacités, les prix de l'acier chinois sont nettement inférieurs à ceux de ses concurrents internationaux. Dans de nombreux pays, l'afflux d'importations d'acier chinois bon marché menace les producteurs nationaux d'acier, qui peinent à concurrencer des importations beaucoup moins chères.

Mesures défensives mondiales contre les importations bon marché

La dynamique des exportations d'acier chinois a incité de nombreux pays à prendre des mesures de protection sous forme d'augmentations tarifaires ou de droits antidumping. Début 2025, des pays d'Amérique latine comme le Mexique, le Chili et le Brésil ont commencé à augmenter leurs droits de douane sur l'acier chinois. Cette initiative a été rapidement suivie par les États-Unis et l'Union européenne. Récemment, des partenaires commerciaux asiatiques clés de la Chine, dont l'Inde et la Thaïlande, ont également rejoint cette vague de protectionnisme. Cela pourrait mettre à l'épreuve les relations économiques, la Chine étant un acheteur et un investisseur majeur dans de nombreux pays d'Amérique latine et d'Asie.

Sous la présidence de Donald Trump, les États-Unis ont pris des mesures particulièrement agressives. Le 12 mars 2025, les droits de douane supplémentaires sur les produits en acier et en aluminium, initialement introduits en 2018, ont été réactivés après avoir été partiellement suspendus sous l'administration Biden. Le taux tarifaire était initialement fixé à 25 %. Le 4 juin 2025, Trump a porté les droits de douane sur les importations d'acier et d'aluminium à 50 % pour tous les pays, à l'exception de la Grande-Bretagne. Ces mesures visent à renforcer l'industrie sidérurgique américaine et à protéger les intérêts de sécurité nationale. Environ un quart de l'acier utilisé aux États-Unis est importé, la majorité provenant des pays voisins, le Mexique et le Canada, ou de proches alliés en Asie et en Europe.

Coincé entre les tarifs américains et les barrières de l'UE

L'industrie sidérurgique britannique est confrontée à un double fardeau sans précédent. D'une part, les exportations d'acier britannique vers les États-Unis sont soumises à un droit de douane de 25 % depuis mars 2025, suite à la réintroduction de ces droits par Trump. Bien que le Royaume-Uni ait bénéficié d'un traitement préférentiel dans le cadre d'un accord de prospérité économique avec les États-Unis le 8 mai 2025 et continue de payer un droit de douane de 25 %, tandis que d'autres pays doivent s'acquitter de 50 % depuis juin 2025, ces droits de douane représentent néanmoins un fardeau considérable. Les États-Unis sont le deuxième marché d'exportation de l'acier britannique, avec environ 200 000 tonnes exportées chaque année, soit 9 % en valeur et 7 % en volume.

D'autre part, l'UE menace désormais d'augmenter drastiquement le prix du principal marché d'exportation de l'acier britannique, voire de le priver complètement de son principal débouché, avec son projet de droits de douane de 50 %. Les exportateurs d'acier britanniques ont décrit la situation aux médias comme un double coup dur. L'un d'eux a déclaré que les nouvelles règles de l'UE auraient un impact direct sur les exportations britanniques et entraîneraient un détournement de trafic négatif. Lisa Coulson, directrice commerciale de British Steel, s'est dite particulièrement préoccupée par les informations faisant état de réductions prévues des quotas d'importation d'acier par l'UE. Cela pourrait exclure les fabricants britanniques de leur principal marché d'exportation tout en continuant à être soumis à des droits de douane de 25 % aux États-Unis.

Les coûts élevés de l'énergie comme désavantage concurrentiel auto-créé

Outre les défis liés à la politique commerciale, l'industrie sidérurgique britannique est confrontée à d'importants désavantages concurrentiels structurels. Le coût extrêmement élevé de l'énergie constitue un problème particulièrement grave. De nouvelles données d'UK Steel de septembre 2025 montrent que les producteurs d'acier britanniques devraient payer l'électricité jusqu'à 25 % de plus en 2025 et 2026 que leurs concurrents français et allemands. Cela entraîne des coûts supplémentaires de 26 millions de livres sterling par an. UK Steel a estimé à 117 millions de livres sterling par an les coûts supplémentaires pour les producteurs d'acier britanniques dus à des prix de l'électricité plus élevés par rapport à leurs concurrents européens.

Les coûts énergétiques élevés sont particulièrement problématiques, car l'industrie sidérurgique adopte de plus en plus les fours à arc électrique, dont les besoins énergétiques sont nettement supérieurs à ceux des hauts fourneaux traditionnels. L'électricité est un intrant fondamental pour la production d'acier, et des prix compétitifs de l'électricité deviendront de plus en plus importants pour la compétitivité, la réussite et la pérennité de l'industrie à mesure qu'elle passe à l'électrification. Gareth Stace, de UK Steel, a souligné que l'industrie sidérurgique britannique a les mains liées, avec des prix de l'électricité jusqu'à 25 % supérieurs à ceux de ses concurrents européens. Ces prix non compétitifs menacent l'emploi, les investissements futurs et les ambitions de neutralité carbone.

Dépendance aux importations en raison de la diversité limitée des produits

Le marché britannique de l'acier est fortement dépendant des importations. En 2023, la production s'élevait à 5,6 millions de tonnes, contre 7,6 millions de tonnes pour la consommation. Cependant, les producteurs d'acier britanniques n'ont satisfait que partiellement cette demande, vendant 3,04 millions de tonnes sur le marché intérieur. Les 4,46 millions de tonnes restantes provenaient de fournisseurs étrangers. En 2023, le taux de pénétration des importations était de 60 %, contre 55 % l'année précédente.

Les importateurs ont pu s'assurer une part aussi importante du marché, non seulement parce qu'une part importante des produits sidérurgiques locaux était exportée, mais surtout grâce à la gamme limitée de produits des aciéries britanniques. Prenons l'exemple de l'acier plat laminé à froid de catégorie 2, utilisé dans la fabrication de pièces automobiles et d'appareils électroménagers. Il est produit au Royaume-Uni uniquement dans une aciérie de Tata Steel, et en quantités très limitées. La direction de l'entreprise a donc décidé d'interrompre la commercialisation et d'utiliser l'intégralité de la production pour la production de galvanisation.

 

Notre expertise européenne et allemande en matière de développement commercial, de ventes et de marketing

Notre expertise européenne et allemande en matière de développement commercial, de ventes et de marketing - Image : Xpert.Digital

Secteurs d'activité : B2B, digitalisation (de l'IA à la XR), ingénierie mécanique, logistique, énergies renouvelables et industrie

En savoir plus ici :

Un pôle thématique avec des informations et une expertise :

  • Plateforme de connaissances sur l'économie mondiale et régionale, l'innovation et les tendances sectorielles
  • Recueil d'analyses, d'impulsions et d'informations contextuelles issues de nos domaines d'intervention
  • Un lieu d'expertise et d'information sur les évolutions actuelles du monde des affaires et de la technologie
  • Plateforme thématique pour les entreprises qui souhaitent en savoir plus sur les marchés, la numérisation et les innovations du secteur

 

80 000 emplois en jeu : comment la Grande-Bretagne peut-elle défendre sa base sidérurgique ?

Affaiblissement de la demande des secteurs de l'automobile et de la construction

La demande d'acier au Royaume-Uni est principalement tirée par les secteurs de l'automobile et de la construction, tous deux confrontés à des difficultés ces dernières années. La production automobile britannique a diminué de 13,9 % pour atteindre 779 584 unités en 2024, avec une baisse de 8 % sur le marché intérieur, à 176 019 unités. La production totale de véhicules a chuté de 11,8 % pour atteindre 905 233 unités sur la même période. La production de véhicules électriques a même diminué de 20,4 % pour atteindre 275 896 unités. Le secteur automobile traverse une transition difficile vers les véhicules électriques, ce qui impacte la demande d'acier.

Le secteur de la construction a également connu des difficultés, en raison de la hausse des coûts et d'une baisse des investissements et de la demande dans un contexte économique difficile. La production du secteur de la construction a fortement chuté fin 2023, mais au second semestre 2024, selon l'Office for National Statistics, une lente reprise a été enregistrée dans la plupart des secteurs, à l'exception du logement social et des travaux commerciaux. Cependant, le secteur a enregistré un nombre élevé de faillites, totalisant 4 102 au cours des 12 mois précédant novembre 2024, soit une baisse de 6,3 % par rapport aux 12 mois précédents.

Revue historique : Les fondements de l'industrie britannique

L'industrie sidérurgique possède une longue et prestigieuse histoire en Grande-Bretagne. Le pays fut le berceau de la Révolution industrielle entre 1760 et 1840, qui apporta une mécanisation innovante et de profonds changements sociaux. Ce processus vit l'invention des machines à vapeur, utilisées dans les usines des centres urbains en pleine expansion. L'industrie sidérurgique britannique joua un rôle central dans l'industrialisation du pays et contribua significativement à sa puissance économique et à son influence mondiale.

Durant l'entre-deux-guerres du XXe siècle, les sympathies des industriels britanniques de l'acier allaient sans conteste au gouvernement conservateur. Ils l'ont poussé à adopter une politique tarifaire protectionniste contre la concurrence étrangère et ont soutenu la politique d'Ottawa, qui visait à créer une zone économique fermée au sein de l'Empire britannique. L'adhésion de l'industrie sidérurgique britannique à la Communauté internationale des exportateurs d'acier brut en 1935 a souligné l'influence remarquable de l'industrie sidérurgique britannique sur le gouvernement.

Développement d'après-guerre : de la nationalisation aux prises de contrôle mondiales

Pendant la Seconde Guerre mondiale, l'État contrôlait la production d'acier, et ce, par la suite. En 1967, le gouvernement a regroupé 90 % de la production – 14 entreprises employant 268 500 personnes – sous l'égide de British Steel. British Steel a fermé de petites aciéries vétustes et concentré la production sur cinq sites. Cette restructuration s'est heurtée à une résistance farouche. Les travailleurs ont résisté par une grève de 13 semaines en 1980, finalement infructueuse. Margaret Thatcher, au pouvoir depuis 1979, s'est concentrée sur la privatisation.

À la fin des années 1980, l'entreprise était à nouveau rentable et ses effectifs avaient diminué de moins de moitié. En 1988, le gouvernement Thatcher privatisa British Steel. En 1999, British Steel et l'entreprise néerlandaise Hoogovens fusionnèrent pour former Corus. Trois ans et trois PDG plus tard, l'entreprise était au bord de la faillite. Sous la direction de Philippe Varin, Corus se redressa grâce à de nouvelles suppressions d'emplois. En février 2007, l'acquisition de Corus par le groupe indien Tata fut annoncée. À cette époque, Corus employait 24 000 personnes sur quatre sites en Grande-Bretagne.

Le Brexit, un catalyseur de crise supplémentaire

Le Brexit a encore compliqué la situation de l'industrie sidérurgique britannique. Même après le Brexit, la Grande-Bretagne demeure une économie ouverte, fortement dépendante du commerce extérieur. En 2024, les exportations de biens et de services représentaient environ un tiers de son produit intérieur brut. L'UE, qui représente 48 % des exportations britanniques, est un marché de vente nettement plus important que les États-Unis, qui en représentent 16 %. Les espoirs britanniques de tirer un important bénéfice du Brexit de leur sortie de l'Union européenne ne se sont pas concrétisés. Le pays n'a pas acquis de flexibilité financière significative ni réussi à compenser, même de loin, les désavantages commerciaux résultant du Brexit par de nouveaux accords commerciaux avec des pays tiers.

En 2021, première année où les règles du marché unique ont été remplacées par les dispositions de l'accord de commerce et de coopération, les effets négatifs sur les échanges de marchandises entre les deux espaces économiques sont devenus évidents. Les importations britanniques en provenance de l'UE ont particulièrement souffert. Le protocole sur l'Irlande du Nord n'a que partiellement répondu aux espoirs placés en lui. Les contrôles aux frontières en mer d'Irlande ont engendré des tensions politiques. Les effets de détournement des échanges commerciaux entre la Grande-Bretagne et l'Irlande du Nord sont également manifestes.

Les conséquences concrètes : comment l’UE prévoit de restreindre l’accès au marché

La réduction proposée de 47 % des quotas d'importation d'acier en franchise de droits signifie que beaucoup moins d'acier peut être importé dans l'UE sans être soumis à des droits de douane. Pour les sidérurgistes britanniques, cela pourrait restreindre considérablement, voire supprimer complètement, l'accès à leur principal marché d'exportation. Si les expéditions d'acier britannique dépassent les nouveaux quotas, nettement plus bas, un droit de douane de 50 % s'appliquerait, rendant les produits sidérurgiques britanniques pratiquement non compétitifs sur le marché européen. Emily Sawicz, directrice et analyste industrielle senior chez RSM UK, a décrit l'annonce de l'UE comme une menace importante pour l'industrie sidérurgique britannique. L'UE représente environ 80 % des exportations d'acier britanniques ; ces droits de douane risquent donc de couper l'accès au marché le plus vaste et le plus stratégique du Royaume-Uni, à un moment où le secteur subit déjà une pression énorme de la concurrence mondiale et de la hausse des coûts de l'énergie.

La mesure proposée remplacerait la mesure de sauvegarde sur l'acier, qui expire en juin 2026. Elle répond aux appels des travailleurs, de l'industrie, de plusieurs États membres, des députés européens et des parties prenantes de l'UE, qui souhaitent assurer une protection solide et durable à l'industrie sidérurgique européenne afin de préserver les emplois dans l'UE et de soutenir le secteur dans ses efforts de décarbonation. Cependant, pour l'industrie sidérurgique britannique, cela représente une menace existentielle pour ses exportations.

Espoir d'exceptions et de réglementations spéciales

La Commission européenne a annoncé qu'en raison de leur intégration étroite au marché intérieur de l'UE en vertu de l'accord sur l'Espace économique européen, aucun contingent tarifaire ni droit de douane ne s'appliquerait aux exportations en provenance de Norvège, d'Islande et du Liechtenstein. Ces pays font partie de l'EEE et sont donc soumis à des règles différentes de celles des pays tiers. La Commission a également fait part de sa volonté d'exempter l'Ukraine de droits de douane, arguant que les intérêts d'un pays candidat confronté à une situation sécuritaire urgente et immédiate devraient être pris en compte lors de l'attribution des contingents, sans compromettre l'efficacité de la mesure.

Pour le Royaume-Uni, qui ne fait pas partie de l'EEE et n'a pas le statut de pays candidat en cas de crise sécuritaire, il n'existe actuellement aucune exemption claire. Cependant, l'ambassadeur de l'UE au Royaume-Uni, Pedro Serrano, a déclaré que des négociations seraient menées avec des pays comme le Royaume-Uni ayant conclu un accord commercial avec l'UE afin d'envisager une répartition spécifique du contingent en franchise de droits par pays. Il a confirmé que des contacts avaient déjà eu lieu au niveau officiel entre Whitehall et Bruxelles et se poursuivraient. Le gouvernement britannique espère que ces négociations aboutiront à une solution plus favorable pour l'industrie sidérurgique nationale.

La stratégie du gouvernement : négociations et ses propres remparts

Le gouvernement britannique tente de négocier à plusieurs niveaux pour atténuer l'impact des droits de douane américains et européens sur l'acier. Le Premier ministre Keir Starmer a souligné à plusieurs reprises que le Royaume-Uni était en pourparlers avec l'UE et les États-Unis au sujet de ces droits. Cependant, le gouvernement évite de divulguer publiquement ses revendications spécifiques ou ses positions de négociation. Cela pourrait indiquer que les négociations en sont encore à leurs débuts ou que le gouvernement souhaite éviter d'affaiblir sa position de négociation en révélant trop d'informations trop tôt.

Le secrétaire au Commerce, Jonathan Reynolds, a annoncé dans une lettre adressée à l'Autorité des recours commerciaux son intention de rejeter les recommandations de l'autorité et de prendre une décision différente en introduisant des limites d'importation plus basses pour l'acier en provenance de certains pays. Ces mesures visent à garantir l'efficacité globale des garanties britanniques pour les producteurs d'acier nationaux tout en préservant la sécurité d'approvisionnement du marché britannique. En juin 2025, le Royaume-Uni a instauré des restrictions commerciales plus strictes que prévu sur l'acier, limitant les importations en provenance du Vietnam, de Corée du Sud et d'Algérie afin de mieux protéger l'approvisionnement national des conséquences d'une guerre commerciale mondiale.

Résistance de l'UE : l'industrie automobile européenne tire la sonnette d'alarme

Les droits de douane prévus sur l'acier par l'UE ont suscité la controverse non seulement en Grande-Bretagne, mais aussi au sein même de l'UE. L'Association des constructeurs européens d'automobiles a averti que ces mesures pourraient mettre en danger l'industrie automobile nationale. L'association a souligné que les constructeurs automobiles européens s'approvisionnent en acier à environ 90 % directement auprès de l'UE et s'inquiète particulièrement de l'impact inflationniste que ces restrictions auront sur les prix du marché européen. La réduction significative des quotas et le doublement des droits de douane hors quota à 50 % limiteraient fortement la capacité à pallier les pénuries du marché par les importations.

La directrice générale de l'ACEA, Sigrid de Vries, a reconnu la nécessité d'une certaine protection du secteur sidérurgique, mais a déclaré que les paramètres proposés par la Commission étaient trop larges et isoleraient excessivement le marché européen. Elle a appelé à un meilleur équilibre entre les besoins des producteurs et des consommateurs d'acier européens dans ce secteur. Les nouvelles règles d'origine, fondées sur le principe de la fusion et du moulage, limiteraient les importations et imposeraient une charge administrative importante aux consommateurs européens de produits sidérurgiques importés.

Le défi de la décarbonisation et de l'ajustement carbone aux frontières

L'industrie sidérurgique mondiale subit une pression énorme pour réduire ses émissions de CO2 et atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. L'Union européenne s'est fixé des objectifs ambitieux avec son Pacte vert et son programme « Ajustement à l'objectif 55 ». Dans le cadre de ces efforts, le Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) a été introduit. Une période transitoire assortie d'obligations de déclaration est en vigueur depuis octobre 2023. À compter du 1er janvier 2026, le MACF s'appliquera aux importateurs de certains biens à fortes émissions dans l'UE. Il s'agit principalement de produits des secteurs du fer et de l'acier, de l'aluminium, du ciment, de l'électricité, des engrais, de l'ammoniac, de l'hydrogène et du minerai de fer.

Le CBAM vise à créer des conditions de concurrence équitables pour les fabricants nationaux et étrangers, à accroître l'efficacité du prix du carbone et à promouvoir une production respectueuse du climat à l'échelle mondiale. Pour l'industrie sidérurgique, cela implique des coûts et des charges administratives supplémentaires, notamment pour les importations en provenance de pays aux normes environnementales moins strictes. L'industrie sidérurgique britannique, déjà confrontée à des coûts énergétiques et de transformation élevés, subit une pression accrue du CBAM tout en s'efforçant de décarboner sa propre production.

L'impact économique : des dizaines de milliers d'emplois menacés

Malgré son déclin, l'industrie sidérurgique britannique demeure un employeur important. Le secteur sidérurgique emploie directement 33 700 personnes, et 42 000 autres emplois dépendent de la chaîne d'approvisionnement au sens large. Les salaires dans la sidérurgie sont en moyenne supérieurs de 26 % à la médiane nationale et de 35 % à la médiane régionale au Pays de Galles, dans le Yorkshire et dans le Humberside, où se concentrent la majorité des emplois sidérurgiques. En 2023, l'industrie sidérurgique britannique a contribué directement à hauteur de 1,8 milliard de livres sterling à l'économie britannique, de 2,4 milliards de livres sterling supplémentaires via les chaînes d'approvisionnement et de 3,4 milliards de livres sterling à la balance commerciale du pays.

Le syndicat communautaire estime qu'environ 80 000 emplois dépendent directement ou indirectement de la sidérurgie, sur l'ensemble de la chaîne de valeur. Alors qu'environ 80 % des exportations britanniques d'acier sont destinées à l'Europe, les mesures prévues par l'UE constituent une menace fondamentale pour l'industrie, ainsi que pour les milliers d'emplois et les communautés qu'elle soutient à travers le pays. La perte de ces emplois toucherait particulièrement les régions déjà confrontées aux effets d'une forte désindustrialisation.

La recherche de solutions et les revendications politiques

L'industrie sidérurgique britannique est confrontée à la difficile tâche de trouver des marchés alternatifs et d'accroître sa compétitivité. UK Steel appelle le gouvernement à prendre des mesures globales pour améliorer la compétitivité du secteur. Ces mesures incluent notamment des prix de l'électricité industrielle parmi les plus bas d'Europe, la compétitivité de la ferraille et sa recyclabilité, un partenariat entre le gouvernement et l'industrie, et des investissements dans l'innovation. UK Steel propose l'introduction d'un mécanisme bidirectionnel de contrats sur différence pour l'électricité de gros, qui alignerait les prix de l'électricité industrielle britannique sur ceux de la France et de l'Allemagne.

L'organisation demande également que l'augmentation de la compensation des charges de réseau à 90 % soit appliquée rétroactivement à compter d'avril 2025 afin d'éviter une nouvelle année de coûts excessifs pour les producteurs britanniques. Grâce à ces mesures, le gouvernement pourrait enfin remédier aux inégalités de prix de l'électricité industrielle. Gareth Stace a souligné que ce coût est énorme. En garantissant des prix de l'électricité compétitifs, le Royaume-Uni peut bâtir une industrie sidérurgique moderne et bas carbone, qui soutiendra les énergies, les infrastructures et l'industrie manufacturière propres pour les décennies à venir.

Opérations de sauvetage inégales : le cas de Scunthorpe et de Port Talbot

Alors que les hauts fourneaux de Port Talbot sont déjà fermés, l'aciérie de Scunthorpe, propriété de l'entreprise chinoise Jingye et opérant sous le nom de British Steel, se trouve dans une situation tout aussi précaire. En avril 2025, le gouvernement britannique a pris des mesures extraordinaires pour sauver l'usine. Le Parlement a été convoqué un samedi pour une rare session afin d'adopter une loi d'urgence permettant au gouvernement de prendre le contrôle de l'aciérie en Angleterre. Il s'agissait de la première session parlementaire de ce type depuis 1982. Le Premier ministre Starmer a déclaré que l'avenir de British Steel était en jeu, la sécurité économique et nationale étant en jeu.

Le traitement différent réservé à Port Talbot et Scunthorpe a suscité la controverse. Des responsables politiques gallois ont accusé le gouvernement britannique de faire deux poids, deux mesures. Liz Saville-Roberts, cheffe du Plaid Cymru à Westminster, a souligné que Scunthorpe recevait des assurances, tandis que Port Talbot n'avait reçu qu'un signe. Elle a critiqué la décision du gouvernement de ne pas intervenir au Pays de Galles et a décrit cette journée comme une profonde déception pour Port Talbot. Cependant, le gouvernement a fait valoir que la situation des deux aciéries était différente et que Port Talbot était dans une position plus avantageuse grâce au gouvernement travailliste.

Perspectives d'avenir incertaines pour un ancien géant industriel

Les perspectives à long terme de l'industrie sidérurgique britannique demeurent extrêmement incertaines. Sans négociations fructueuses avec l'UE sur des quotas spécifiques à chaque pays ou des exemptions aux droits de douane de 50 %, l'industrie pourrait connaître un effondrement existentiel. Après une conversion complète aux fours à arc électrique et l'élimination de la production d'acier primaire, le Royaume-Uni serait le seul pays du G20 incapable de produire de l'acier primaire à partir de minerai de fer et de charbon. Cela affaiblirait considérablement l'autonomie stratégique et la base industrielle du pays.

L'industrie sidérurgique britannique, autrefois puissante, a connu un déclin spectaculaire depuis son apogée dans les années 1970 et ne représente plus que 0,1 % de l'économie. Il s'agit d'un nouveau coup dur pour le berceau de la révolution industrielle, autrefois reconnu mondialement. L'industrie est confrontée à la tâche herculéenne de s'affirmer dans un environnement mondial de plus en plus protectionniste, tout en gérant l'approvisionnement énergétique le plus coûteux des pays du G7 et en investissant dans une décarbonation coûteuse. La capacité de l'industrie sidérurgique britannique à surmonter ces divers défis dépendra en grande partie de la capacité du gouvernement à créer le cadre nécessaire et à mener à bien les négociations internationales.

 

Votre partenaire mondial de marketing et de développement commercial

☑️ Notre langue commerciale est l'anglais ou l'allemand

☑️ NOUVEAU : Correspondance dans votre langue nationale !

 

Konrad Wolfenstein

Je serais heureux de vous servir, vous et mon équipe, en tant que conseiller personnel.

Vous pouvez me contacter en remplissant le formulaire de contact ou simplement m'appeler au +49 89 89 674 804 (Munich) . Mon adresse e-mail est : wolfenstein xpert.digital

J'attends avec impatience notre projet commun.

 

 

☑️ Accompagnement des PME en stratégie, conseil, planification et mise en œuvre

☑️ Création ou réalignement de la stratégie digitale et digitalisation

☑️ Expansion et optimisation des processus de vente à l'international

☑️ Plateformes de trading B2B mondiales et numériques

☑️ Pionnier Développement Commercial / Marketing / RP / Salons

 

Bénéficiez de la vaste expertise quintuple de Xpert.Digital dans un package de services complet | BD, R&D, XR, PR & Optimisation de la visibilité numérique

Bénéficiez de la vaste expertise de Xpert.Digital, quintuple, dans une offre de services complète | R&D, XR, RP et optimisation de la visibilité numérique - Image : Xpert.Digital

Xpert.Digital possède une connaissance approfondie de diverses industries. Cela nous permet de développer des stratégies sur mesure, adaptées précisément aux exigences et aux défis de votre segment de marché spécifique. En analysant continuellement les tendances du marché et en suivant les évolutions du secteur, nous pouvons agir avec clairvoyance et proposer des solutions innovantes. En combinant expérience et connaissances, nous générons de la valeur ajoutée et donnons à nos clients un avantage concurrentiel décisif.

En savoir plus ici :

Quitter la version mobile